PREFACE

Jean-Luc ALBERT

Professeur des universités
Aix-Marseille Université
Directeur du Master 2 Douane

Ouvrages:
– Le droit douanier de l’Union européenne, Bruylant, 2019.
– Finances publiques (individuel à partir de la 7ème édition, 2011, 8ème édition 2013, 9ème
éd. 2015, 10èmé éd. 2017, 11e édition 2019).
– Douane et droit douanier, PUF, coll. Questions judiciaires, 2013.
– Fiscalité et personnes publiques, LGDJ, 2012
– Vingt ans de vie politique en France, éd. L’Organisation, 1996
– La politique française de la concurrence, PUL, 1992
– La vie politique dans l’Allier sous la Vème République, éd. Revue d’Auvergne, 1984.

 

Il est des organisations particulièrement méconnues dont on perçoit mal le rôle, les fonctions, et dont l’activité, pourtant essentielle, n’est perçue que par un monde professionnel relativement restreint.

Si l’on parle, étudie, dissèque, l’Organisation mondiale du commerce et le « droit OMC », la place et le rôle de l’Organisation mondiale des douanes (OMD) sont peu analysés, l’OMD apparaissant, pour ceux qui examinent le rapport OMC/OMD, comme un simple bras technique et gestionnaire de l’OMC.

Et pourtant, à l’approche des soixante-dix années de l’OMD, bel âge pour une organisation internationale, puisque créée en 1952, sa première réunion ayant eu lieu en janvier 1953, il pouvait paraître judicieusement utile et intéressant de faire le point sur cette organisation à la fois dans une perspective temporelle et dans ses dimensions fonctionnelles.

Le Conseil de coopération douanière devenu en 1994 l’Organisation mondiale des douanes, présente de nombreuses caractéristiques et originalités, outre le fait qu’elle est réellement le creuset de la réflexion douanière et du monde douanier, des compétences, échanges, y compris avec le monde de la recherche, le monde universitaire.

Il est vrai que les questions douanières, voire le droit douanier, apparaissent pour beaucoup comme des questions un peu « passées », d’un ancien temps, ayant perdu dans un vaste processus de mondialisation et d’ouverture des échanges, un véritable intérêt économique, juridique, politique, et pourtant…

En étudiant et présentant les fonctions et activités de l’OMD, M. Hector Hugo Juarez Allende, au travers d’un ouvrage qui approche les 500 pages, retrace non seulement la vie de cette organisation, son attractivité, ses fonctionnalités, mais aussi toute la vie du commerce international depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

L’auteur maitrise pleinement son sujet ; expert en la matière en regard déjà de son itinéraire professionnel et de son expérience, il nous offre ici un très bel ouvrage, particulièrement riche et dense tout en nous guidant dans les « arcanes » institutionnelles, juridiques, techniques, caractérisant le commerce international et ses dimensions douanières.

L’ouvrage est organisé en dix-huit points sur la base d’une progression thématique allant d’une présentation introductive à l’agenda du futur et à quelques derniers mots.

Est-il ouvrage plus complet que celui-ci ? On peut en douter.

Salué dans un prologue par M. Ricardo Trevino Chapa, secrétaire général adjoint de l’OMD, cet ouvrage constitue une véritable dissection de cette organisation non seulement sur le plan de ses activités et de leur accroissement mais aussi dans ses rapports avec ses partenaires institutionnels.
On découvre ici la complexité et la diversité de la « machine douanière » à la fois sur le plan des structures internes de l’OMD, de sa mécanique juridique ou plutôt « ses » mécaniques juridiques parfois ou souvent méconnues comme les protocoles d’accord, les conventions administratives.
L’OMD joue à la fois un rôle d’initiation d’un droit conventionnel mais aussi de « gestionnaire » de différentes conventions conclues dans le cadre de l’OMC.

Globalement, les quatre premiers points ou chapitres de cet ouvrage constituent une présentation générale de l’institution, pour ensuite passer à des développements plus spécifiques comme les relations de l’OMD avec les courtiers en douane, présenter des approches plus thématiques centrées sur les thèmes essentiels et traditionnels de l’activité de l’OMD, à savoir la classification des marchandises, l’évaluation, l’origine ; il nous propose ensuite un ensemble de réflexions portant sur des questions plus « d’actualité » come la lutte contre la fraude, les procédures et facilitation des échanges. Enfin, les chapitres 11 à 18 constituent des axes plus particuliers de présentation dont l’intérêt est évident en particulier pour le monde de la recherche, le monde universitaire comme le renforcement des capacités par exemple au travers du programme Picard, les questions touchant à l’éthique, à la performance de l’organisation, la recherche, etc.

L’auteur, utilise cet ouvrage pour traiter de points spécifiques, ouverts comme des sortes de « dossiers » ayant leur propre cohérence et réflexion comme en matière d’intelligence artificielle, de drones, de blockchain, sur la compétitivité économique, les nouvelles technologies et leur impact, le recouvrement des recettes par les administrations douanières, sujet particulièrement évolutif en France.
Les présentations assurées sont claires, généralement resituées dans un contexte historique, parfois politique, tout en n’hésitant pas à montrer les limites de l’action de l’OMD avec une originalité saluée ici, la « transmission à des fins académiques » et peut-être pédagogiques du contenu informatif et fonctionnel relatifs à l’OMD.

L’auteur de ces lignes est en outre sensible aux développements figurant aux pages 407 et suivantes centrées sur la recherche et la « nécessité de procéder à la recherche active de sa (l’activité douanière) connaissance par la recherche scientifique et systématique… » permettant la « formulation de politiques douanières », l’OMD disposant depuis 2009 d’une Unité de recherche, tout en ayant, il faut le rappeler, développé depuis 2006 le programme Picard marqué par une conférence annuelle associant administrateurs des douanes et chercheurs, notamment du monde académique, en ayant enfin initié un Réseau universitaire international d’études des questions douanières (INCU).

En promouvant, depuis 2020, une « stratégie Picard », l’OMD montre bien l’évolution de ses réflexions et de son positionnement.

Le monde douanier n’est plus replié sur lui-même mais ouvert à la coopération et à la recherche.

Vaste sujet que voilà, dès lors que l’auteur nous rappelle que « l’activité douanière est un phénomène social » (p.408) !

L’ouvrage comporte un appareil bibliographique, des annexes limitées mais utiles avec la convention constitutive du CCD devenu OMD, sa convention d’établissement dans les versions anglaise et française, l’accord avec la Belgique, l’état des conventions et de leur adhésion, …, et de façon toute originale un formulaire d’auto-évaluation institutionnelle.

On l’aura compris cet ouvrage est particulièrement riche, utile et arrive au « bon moment » et l’on ne peut que saluer sa publication en version française par les éditions Bruylant.